Le 2 octobre dernier est paru le décret relatif à l’Allocation Journalière du Proche Aidant. C’est une forme concrète de reconnaissance du rôle des proches aidants dans la société, débutée avec la loi du 11 février 2005 « pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées » puis en 2015 avec la loi ASV, inscrite en tant que telle dans la loi de 2019 favorisant la reconnaissance des proches aidants. L’approche transversale du sujet avec la convergence des politiques relatives aux personnes âgées et aux personnes en situation de handicap, et également avec l’ouverture de ce congé à d’autres catégories d’actifs que les salariés du privé (salariés du public, travailleurs indépendants par ex) est un point positif à souligner
Cela étant, nous rappelons
- notre vigilance quant à l’accessibilité et le recours à ce congé, notamment en l’absence de corrélation entre la déclaration du congé à l’employeur et la mise en œuvre du versement des allocations (ACJP) afférentes par les caisses d’allocation familiales (CAF) ainsi que la mutualité sociale agricole (MSA) ;
- la nécessité d’élargir davantage son champ d’application afin de répondre au mieux à la diversité des situations des aidants. A ce jour, pour être éligible à ce dispositif, les aidants doivent justifier d’un taux d’incapacité permanente au moins égal à 80 % de la personne accompagnée, et/ou bénéficiant de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) en raison de situations relevant d’un GIR 1, 2 et 3. Nombre de situations, relatives à des maladies chroniques par exemple, ne rentrent pas dans ces critères d’éligibilité.
- Et en cette période de crise sanitaire et sociale, nous n’oublions pas les proches partageant le même domicile de salariés présentant un risque de développer une forme grave d’infection au virus de Covid-19. Ceux-ci, depuis le décret paru au Journal Officiel le 30 août 2020, ne bénéficient plus du dispositif de chômage partiel et, pour un certain nombre d’entre eux, ne sont pas éligibles au congé de proche aidant.
Les entreprises ont un rôle essentiel à jouer tant pour faire connaitre ce dispositif que pour en faciliter l’accès en interne. Il s’agit là d’un vrai travail d’acculturation à mener par les organisations avec leurs collaborateurs. D’autant que la Stratégie nationale de mobilisation et de soutien 2020-2022 (mesure 11) prévoit l’inscription du soutien aux proches aidants parmi les thèmes des négociations obligatoires en entreprise au titre de la Responsabilité sociale et environnementale des entreprises. Il sera important de regarder l’utilisation, dans les faits, de ce congé à la fois sur des aspects de temps et également d’indemnisation. A ce titre, le rapport 2022 prévu dans la loi, nous permettra de faire cette analyse avec un recul d’un an de pratique.
Enfin ce congé n’est pas la réponse unique, c’est une proposition parmi la palette existante. Tous les proches aidants n’ont pas les mêmes besoins et ces besoins sont évolutifs en fonction des différents moments de la vie. C’est pourquoi, il est essentiel que les aidants qui souhaitent être accompagnés aient chacun accès à des réponses adaptées à leur situation et qu’en premier lieu les personnes accompagnées doivent avoir accès aux aides et aux soins requis par leur situation, et ce partout sur le territoire.
Pour rappel notre Association mène, depuis 2003, des actions d’accompagnement des proches aidants partout sur le territoire français, en métropole et en outre-mer, tels que les Cafés des Aidants ou les Formations des Aidants. Ces actions sont ouvertes à tous les proches aidants, quels que soient l’âge, la pathologie, le handicap de la personne accompagnée. En 2019, ces actions menées en partenariat avec plus de 220 structures locales ont permis d’accompagner plus de 12 000 aidants.
La question de l’emploi fait également partie de nos axes forts de travail et à ce titre nous accompagnons dans toute la France, des entreprises de différents secteurs et de différentes tailles au travers de formations, conférences de sensibilisation et de webinaires, Cafés des Aidants en entreprise auxquels ont participé plusieurs centaines de salariés.
Outre la conciliation des temps, la valorisation des compétences développées durant les situations d’aidance est également un sujet clef de l’Association Française des Aidants. Nous avons initié un projet avec AG2R LA MONDIALE avec et pour les proches aidants qui ont été amenés, par choix ou par contrainte, à suspendre leur activité professionnelle et dont on entend si peu parler.
Retour sur l’historique de cette loi :
- Le 22 mai 2019 la loi favorisant la reconnaissance des proches aidants est publiée, elle permet de favoriser le recours au congé de proche aidant.
- 5 mois plus tard, le 23 octobre 2019, le gouvernement annonce une stratégie de mobilisation et de soutien en faveur des aidants. Les mesures 5 à 8 de cette stratégie promettent des avancées pour le congé de proche aidant et notamment une indemnisation : « Le congé de proche aidant indemnisé pour les salariés, les travailleurs indépendants, les fonctionnaires et les chômeurs indemnisés, dès octobre 2020. ».
- Fin décembre 2019, le Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale est publié au Journal Officiel et vient confirmer cette annonce concernant la possibilité d’une indemnisation et évoque également la suppression de la condition d’ancienneté.